3. LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE.

Le 3 septembre 1939, lors de la déclaration de guerre de la France et de l’Angleterre à l’Allemagne, le camp de Caylus constitue le dépôt n° 172 bis dont le commandement est confié au commandant Normand, vétéran d’élite de la première guerre mondiale. Une réserve de mobilisation y est regroupée, destinée à pourvoir différents régiments.

Une dizaine de milliers d’anciens détenus qui n’inspirent pas confiance, dont se souviennent encore les habitants les plus anciens du Causse, transitent par le camp de Livron où ils sont logés sous des marabouts coniques abritant chacun une vingtaine d’hommes. Ce sont « les joyeux », punis de droit commun ayant purgé leur peine ou la terminant, qui commettent souvent, à l’encontre des populations locales, des vols et des méfaits divers. Leur encadrement est composé de réservistes ainsi que de cadres d’active venus de différents centres d’éducation physique. Ils sont placés sous la surveillance de gardes mobiles et de pelotons de spahis à cheval, en turban rouge et burnous blanc, sabre pendant à la ceinture. Après l’armistice signé le 22 juin1940, commence leur démobilisation et, ceux qui n’ont pas terminé leur peine ou ne se sont pas évadés regagnent les prisons.

Un bureau de démobilisation, précisément, est créé au camp. Le commandant Normand en assume la responsabilité jusqu’au 18 août. C’est là même, qu’est démobilisé le 8 juillet le général Charles Delestraint qui deviendra, le 11 novembre 1942, le chef de l’Armée secrète. Les paroles d’adieu qu’il adresse à ses officiers avant de quitter le camp confortent le commandant du camp dans sa détermination de ne pas livrer à l’ennemi le matériel reversé. Jusqu’en octobre 1942, il fait procéder, avec le concours de quelques sous-officiers de son entourage, notamment son adjoint l’adjudant-chef Gilles, à des opérations de camouflage d’armes, de véhicules, d’essence et de matériel militaire divers (appareils de transmission, couvertures) dans les phosphatières du camp, les fermes abandonnées et chez des particuliers comme les sœurs du couvent des religieuses de Vaylats dans le Lot.

En juillet 1942, bien qu’atteint par la limite d’âge de son grade, il est maintenu à son poste, et il lui est demandé de continuer d’en assumer les fonctions….et les risques.

En novembre 1942, les troupes allemandes ayant franchi la ligne de démarcation après le débarquement des forces américaines en Afrique du nord, les opérations de camouflage deviennent plus dangereuses. Des unités SS de la division Das Reich viennent stationner sur le camp en février et mars 1943. Instauration du couvre-feu et réquisitions sont les premières mesures infligées à la population. Les officiers logent chez l’habitant. Après le débarquement  en Normandie, cette division regagne le nord en semant la terreur sur son passage : la Croix Blanche dans le camp où Manuel Azzevedo est tué sur le bord de la route D 85, n’en est que la première étape…Finalement, le commandant Normand est arrêté par la Gestapo le 30 mars 1943 avec l’adjudant-chef Gilles. Ils seront tous les deux envoyés au camp de Buchenwald où le premier décèdera le 15 novembre 1943 des sévices subis.

Par ailleurs, durant cette période de crise, les peuples traqués et meurtris d’Europe marquent aussi leur passage dans le camp. En 1938, ce sont des Espagnols, fuyant la guerre civile qui ravage leur pays. Ils effectuent de nombreux travaux de voierie, dont la « piste blanche » qui relie la « Croix de Manuel » au carrefour des Fontanilles. Puis, arrivent vers la fin de l’été 1940, un contingent important de soldats Polonais qui remplacent les « joyeux ». En 1943, deux maquis se sont installés dans le camp : celui du capitaine Philippe (maquis France aux environs de la ferme de la Bouissière et des granges de Gagnac) et le maquis du commandant Théophile à Pech Sec.

A cette même époque, une cinquantaine de juifs polonais ayant échappé à la déportation sont camouflés et ravitaillés par le camp. Sont là aussi des Indochinois qui se sont rebellés contre la France et retourneront chez eux à la fin de la guerre d’Indochine. Ils fabriquent des bagues avec des pièces trouées et se joignent aux Polonais pour travailler.

A la libération, les Allemands quittent le camp en tant qu’occupants pour y revenir peu après comme prisonniers de guerre. Simultanément, le camp de Livron accueille des Ukrainiens avec femmes et enfants.